François Lasserre (texte) et Stéphane Hette (photographies)
Plume de Carotte, 2015
Cet ouvrage insolite propose une inversion du regard sur le réel : l’imaginaire qui fonde la perception et oriente notre vision du monde des insectes. Il se décline en intermédiaire entre la légende et le monde, sans que l’on cherche à savoir laquelle ou lequel a précédé l’autre.
Chaque « fée », à la fois insecte et personnage, est inscrite dans la nomenclature entomologiste avec son étymologie grecque ou latine ou mixte, et son ordre (lépidoptère, coléoptère, etc.). François Lasserre présente son « pouvoir naturel » (voir à 360°, avoir un catadioptre à l’abdomen en cas de préoccupation amoureuse, hibernation en habitat collectif, enveloppe un arbre dans un drap de soie, etc.), puis suggère son « pouvoir magique » (vœu exaucé, éloignement des mauvais esprits, poudre des ailes servant de baguette magique, etc.).Page après page, les photos de Stéphane Hette jouent avec les transparences ailées, la force des poils ou le lien à une plante amie, portées par un goût épuré de la ligne, du lacis ou de la répétition.
L’œil adulte se découvre des favoris, mesurant l’injustice de ses propres choix : la belle « mendiante » velue, blanche et mouchetée de noir (qui n’a d’ailleurs rien d’une quémandeuse), si proche de « l’hyponomeute » (celle qui creuse en dessous), ou encore l’isabelle aux ailes « en vitrail » d’un vert très doux, épinglée comme une broche à l’extrémité d’une branche de pin. Le livre peut être consulté à côté des écrits de J. H. Fabre… L’œil enfant, lui, a sans doute besoin d’une parole plus mûre pour apprécier la singularité de chaque représentation.
Jane Hervé