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Comme une bête (ou comment je suis devenu végétarien)

Cédric Taling

Rue de l’échiquier, 2020

 

Quand on aime manger de la viande, on regarde les végétariens avec suspicion. Mais quand une personne que vous appréciez vous fait part de ce choix, vous ne restez pas indemne. Richard débute une aventure à laquelle il ne s’attendait pas.

 

L’histoire

Manger de la viande est tout à fait normal pour Richard. Toutes les personnes de son entourage en consomment. Quand il était petit, il y avait des moments de jeux en famille avec du saucisson. Des vrais moments de complicité qui ont permis de poser des bases de son identité d’homme. Sa filleule adorée, Camille, du haut de ces 13 ans est végétarienne. Son discours est assez structuré et construit. Le voilà tout bouleverser, la gamine ne dit pas forcément que des inepties.

« – C’est à dire que je te parle de milliers d’animaux tués chaque seconde. J’te parle de la destruction de la biodiversité et de la déforestation. Tout ça pour des brochettes barbecue. Imagine… Si nos brochettes étaient du chien! Tu penses à Violette?

– Violette?! Mais ça n’a rien à voir, c’est ma chienne, c’est pas une vache. » (p. 13).

Il a suffi de cela pour commencer le cheminement. Quand il fait les courses, l’habitude d’acheter du saucisson est automatique. Néanmoins, il se passe quelque chose de singulier. Voilà qu’un cochon géant vient lui parler :

« On vous cache complètement la réalité de certains élevages et l’abattage. Comme ça le consommateur reste dans une ignorance qui n’est pas innocente. Tu es au courant, je pense, que dans la nature, on ne trouve pas de « jambon » ou de « steak » ou encore de « fruits de mer » ». (p. 25) Il poursuit son discours en évoquant le spécisme.

Les choses ne vont pas en s’améliorant. Les cauchemars et l’expérience mystique pousse Richard à remettre en cause son régime alimentaire. Les exceptions deviennent de plus en plus pesantes. Une rencontre inopinée avec une vieille dame redonne du grain à moudre.

La viande pas chère à une histoire. « Le boeuf était devenu un mets prisé par la haute société européenne la demande a explosé. Au début, les bêtes étaient juste parquées à Chicago en attendant de monter dans les wagons. Mais la guerre de Sécession a bloqué les échanges commerciaux et Chicago a dû créer des abattoirs pour gérer le flux des animaux. Et là, ça a été le début de la fin. V’là que nos gars ont inventé la chaîne de désassemblage. En 1890, des centaines d’employés, hommes, femmes, enfants, y traitaient des millions d’animaux, permettant aux deux plus grandes entreprises de réaliser des centaines de millions de chiffre d’affaires annuel. Les porcs et les bœufs étaient préparés en un éclair. A la fin du XIXe siècle, on produisait à Chicago 82% de la viande consommée aux Etats-Unis. Ses chaînes de désassemblage marchaient tellement bien, les profits étaient tellement grands, qu’un ingénieur de chez Ford s’en inspira pour créer ses chaînes d’assemblage automatique. » (pp. 101-102).

L’animal devient un objet de consommation quelconque. Il n’est plus qu’une chose. Rien de telle pour l’amener à vraiment prendre un autre chemin, avec une pointe de regrets.

 

Mon avis

Les bandes dessinées qui parlent de végétarisme deviennent de plus en plus nombreuses. L’approche est plus souvent de donner des arguments face aux reproches réguliers comme la vitamine B12, la souffrance des légumes, la culture intensive du soja…

Après Thoreau et moi, Cédric Taling a fait le choix d’un autre récit. On suit le parcours d’un gars assez ordinaire, Richard, qui aime le plaisir simple de la bonne chair. Surtout que des souvenirs d’enfance sont liés à la transformation de la viande. Une adolescente de 13 ans le met face à une vérité. L’ensemble de ces orientations a des conséquences même si on ne les voit pas de façon concrète. En effet, il y a un peu d’exagération avec les cauchemars qui le hantent. Néanmoins cela est une façon très explicite de montrer la démarche de réflexion. Quand on voit une vache dans un steak, la façon de concevoir l’alimentation est différente. Cela ouvre le champ d’interrogation sur le rapport aux animaux avec leur classement selon leur rentabilité, les enjeux géopolitiques, les impacts environnementaux, le sens de la nutrition et sans oublier le lien de convivialité.

Le problème est assez complexe si l’on veut regarder les choses dans leur intégralité. Cependant, quelques questionnements résonnent chez les lecteurs. Il n’est pas dit que cela les convainc. On ne sait pas si c’est cela vraiment l’objectif rechercher non plus. Pour oser se plonger dans cette bd, il est déjà concerné par le thème du végétarisme/véganisme. Et l’aide à mieux comprendre à faire des choix plus assumés, même s’il y aura toujours de rudes opposants. Donc pas besoin d’être un adepte pour se plonger dans cette lecture.

Une bande dessinée qui montre le parcours d’un homme qui prend une décision qui va impacter sa vie, ses souvenirs et sa vision du monde.

Cédric Taling est d’ailleurs venu à notre Petit marché à la REcyclerie en 2021.

 

 

Prisca

A retrouver chez Rue de l’échiquier

 

En complètement de la lecture
– Le site de l’association L214
– La fresque de la forêt (évoque le lien entre la déforestation et l’élevage intensif).
« Peut-on aimer les animaux et les manger » ? de Guillaume Meurice, La Martinière jeunesse, 2023

 

Comme une bête

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